LE DROIT, FIL D'ARIANE DE L'ACTION CLIMATIQUE
Le Dr. DJIGA a d’emblée posé le droit comme l’épicentre de l’action climatique, en vertu de son rôle de sécurité juridique, de stabilité institutionnelle et d’organisation de la vie politique, sociale et économique. Il a exploré l’évolution du cadre juridique, passant de la prégnance de la « soft law » à l’ancrage progressif de la « hard law ».
De la « soft law » à la « hard law »: Si les traités internationaux comme la Convention-Cadre des Nations Unies sur les Changements Climatiques (CCNUCC), le Protocole de Kyoto et l’Accord de Paris constituent des instruments fondamentaux, leurs obligations juridiques sont parfois imprécises, et leur application par les tribunaux nationaux s’avère difficile. D’où la nécessité de lois nationales sur le climat, à l’image de la loi britannique de 2008, qui établissent des principes généraux et des obligations clairs pour la lutte contre le changement climatique. Plusieurs pays africains ont suivi cette voie, adoptant des législations nationales pour mieux mettre en œuvre leurs engagements internationaux et permettre au pouvoir judiciaire de jouer un rôle plus important dans les affaires climatiques.
La Justice Climatique, Graal des Temps Modernes : La justice climatique, notion de plus en plus présente dans les discours gouvernementaux et de la société civile, vise à rétablir l’équité entre les États, au sein des États, entre les individus et les générations futures, et même envers la nature. Elle s’articule autour des principes du droit international de l’environnement et du droit international des droits de l’homme. Le Dr. DJIGA a souligné l’importance du principe des responsabilités communes mais différenciées, inscrit dans la CCNUCC, qui guide le contentieux climatique. Il a également mis en lumière l’exigence de la cristallisation du droit à l’environnement, illustrée par des affaires emblématiques comme Urgenda c. Pays-Bas, où la Cour suprême a statué que le gouvernement devait réduire ses émissions sur le fondement du principe de précaution.
Le Contentieux Climatique en Afrique: Le Dr. DJIGA a examiné des affaires africaines relatives à l’Accord de Paris et à la législation nationale sur le climat. Il a notamment cité l’affaire South Durban Community Environmental Alliance c. Ministre de l’Environnement et autres en Afrique du Sud et la décision de la Cour suprême du Kenya dans l’affaire Save Lemu et al. c. NEMA, qui a appliqué le principe de précaution en soulignant l’insuffisance de la prise en compte du changement climatique dans une étude d’impact environnemental et social.
S'ENGAGER OU PERIR?
Le Dr. DJIGA a conclu en insistant sur l’urgence pour les États africains de s’engager résolument dans la lutte contre le changement climatique. Il a souligné le rôle crucial de l’accès à la justice pour faire valoir le droit de chacun au respect des dispositions protégeant l’environnement. Les États africains doivent s’unir pour mettre les pays développés face à leurs responsabilités et permettre à leurs citoyens d’ester en justice pour inaction climatique. Il a plaidé pour la mise en place de dispositifs juridiques multiscalaires qui concrétiseront l’action climatique et permettront de sortir de la « tourbière du développement durable », un concept certes auréolé d’une valeur juridique, mais d’une difficile efficience juridique.
Le principal discutant de ce numéro du Café du CERDE, en la personne du docteur Germain DABIRE, enseignant-chercheur à l’UFR-SJP de l’Université Thomas Sankara, a soulevé les principales problématiques en lien avec l’intérêt, les enjeux et l’actualité du sujet. Globalement, ce dernier, dans un argumentaire basé sur des éléments jurisprudentiels et conventionnels, a souligné la pertinence de l’analyse faite par le docteur DJIGA.
Les nombreux participants présents ont également reçu satisfaction suite aux questions et préoccupations qui ont été émises au cours de la discussion.
En rappel, le café du CERDE a pour but de promouvoir l’animation scientifique et citoyenne. Il sert de cadre pour la présentation et l’échange sur des questions de droit et de politique de l’environnement au Burkina Faso. L’activité a lieu une fois par mois, tous les deuxièmes mercredis, de 17h à 18h30, en présentiel et en ligne.