FAUT-IL APPLIQUER LE PRINCIPE OU DES MESURES DE PRECAUTION A L’EPIDEMIE D’EBOLA ?

C’est connu ! Ebola sévit en Afrique de l’Ouest et en République Démocratique du
Congo. Dans la sous-région ouest africaine, la lutte contre la maladie se concentre dans
les pays les plus touchés en l’occurrence, le Liberia, la Sierra Leone et la Guinée. Sur plus
de six mille (6000) cas recensés, l’on dénombre dans ces pays plus de trois mille morts
(3000) avec des pics de décès notamment en Sierra Leone et au Liberia (Statistiques,
Centers for Desease Control and Prévention). Face à la propagation de la maladie qui se
transmet par les liquides corporels d’un malade ou d’une victime d’Ebola ; les pays
frontaliers à ces trois Etats ont pour la plupart décidé de fermer leurs frontières
terrestres avec les Etats affectés, et cela malgré le manque de pertinence de telles
mesures relayées par l’UA et l’OMS. La Côte d’Ivoire et le Sénégal ont adouci leurs
positions en ouvrant des corridors aériens pour acheminer des vivres, des médicaments
et du personnel de santé pour aider les pays touchés.
Quant aux autres Etats de la sous-région, ils adoptent des mesures de protection
des populations contre Ebola. Le Burkina Faso a décidé d’enrayer le risque de
contamination au virus Ebola en prenant des mesures draconiennes. A ce titre, le
gouvernement Burkinabè a annulé systématiquement toutes les grandes manifestations
(Sommet de l’Union Africaine, SIAO) où le regroupement de populations peut présenter
des risques importants. Ainsi, le gouvernement vient une fois de plus de reporter, sine
die, une autre manifestation d’envergure du pays en l’occurrence la 28ème édition du
« Tour du Faso » qui était prévu pour se tenir du 24 au 02 novembre 2014. Selon le
ministre des sports et des loisirs, le report de l’évènement « est motivé par les mesures de
précaution qu’observe le gouvernement Burkinabè face à l’épidémie de fièvre à virus Ebola
en Afrique de l’Ouest ». Le ministre de la communication et porte-parole du
gouvernement Burkinabè confirme ces propos en affirmant sur les ondes de Radio
France Internationale (RFI) que « C’est par mesure de précaution. Nous avons un système
de veille qui fonctionne bien mais avec le cas survenu aux Etats-Unis d’Amérique, notre
système risque d’être éprouvé si jamais il y a le moindre cas d’Ebola au Burkina Faso. C’est
pour cette raison que le gouvernement burkinabè évite l’organisation de toutes les
manifestations pouvant regrouper des milliers de personnes ». Dans le même ordre d’idée,
Mme Annick Girardin, Secrétaire d’Etat française au développement et à la francophonie,
souligne lors d’une visite au Sénégal et en Guinée que « le principe de précaution, il est
toujours là et il faut toujours le maintenir. Ensuite, il y a des décisions qui ont été prises sur
l’arrêt de lignes aériennes ».
Des faits ci-dessus évoqués, il ressort que les fermetures de frontières, les
interdictions et report de manifestations internationales en Afrique de l’Ouest, la
suspension de vols aériens sont prises au titre des mesures ou du principe de
précaution. D’ailleurs ces propos font partie d’une longue liste de faits antérieurs qui
rattachent au principe de précaution des crises qui affectent les Etats. On a encore en
mémoire l’invocation de la précaution dans la grippe A (H1N1), de la tempête Xynthia,
de l’éruption du volcan islandais, etc. Dans tous ces cas, la précaution a été employée
pour la prise de mesures sanitaires radicales. Pourtant, il y a bien en douter sur
l’application de la précaution dans les faits auxquels il est rattaché. C’est ce que nous
tenterons de démontrer.
Pour ce faire, il convient de déblayer les concepts en essayant de poser les
contours du principe de précaution. Apparu sous les projecteurs pour la 1ère fois dans la
déclaration de Rio de 1992 sur l’environnement et le développement, il est appliqué « en
cas de risque de dommages graves ou irréversibles » et « l’absence de certitude scientifique
absolue ne doit pas servir de prétexte pour remettre à plus tard l’adoption de mesures
effectives visant à prévenir la dégradation de l’environnement » (Principe 15 de la
déclaration). Au Burkina Faso, la loi 006-2013 portant code de l’environnement fait
intervenir le principe de précaution « lorsque les conséquences d’une activité sont
inconnues ou même lorsque leur survenance est incertaine, des mesures de précaution
doivent être prises. Celles-ci peuvent selon le cas, consister en l’interdiction de l’activité tant
que la preuve de l’absence d’effets dommageables n’a pas été rapportée » (article 9).
Substantiellement, deux critères fondamentaux peuvent être tirés de ces dispositions : il
s’agit d’une part, de risques de dommages graves et irréversibles à l’environnement
(originellement) et la santé (pratiquement), et de l’absence de certitude scientifique
absolue qui constitue la matrice de la précaution.
Sur le premier critère, il est évident que l’épidémie est source de dommage grave
et irréversible. Ces Etats sortent de longues périodes de conflits armés ou de crises
politiques. La fragilité du système sanitaire, le manque de personnel, de ressources
financières et d’infrastructures constituent une urgence de santé publique d’envergure
internationale selon l’OMS. Les décisions de confinement, de fermeture de frontière, de
ralentissement des échanges commerciaux fragilisent l’économie d’Etats au point de les
contraindre à mendier leurs survies auprès des Etats dits riches. Sans doute, le
dommage causé à ces populations est grave et irréversible notamment lorsque des
victimes de la maladie sont arrachées à l’affection de leurs familles.
Le second critère de la précaution porte sur l’absence de certitude scientifique
absolue. Est-on en situation d’incertitude scientifique devant cette maladie ? Existe-t-il
une incertitude scientifique sur les moyens de contamination ou de transmission
d’Ebola ? Le risque d’atteinte à la santé humaine en cas de contamination est-il
inconnue ? Il n’y a aucun doute quant au fait que le virus est transmis par manipulation
des animaux contaminés et ensuite dans la population par transmission interhumaine. Il
est aussi connu qu’Ebola est une maladie grave et mortelle. Selon l’OMS, le taux de
létalité moyen à la maladie est de 50% et peut parfois connaitre des flambées de près de
90%. A ce jour, les informations sur la transmission, le diagnostic, la prévention, de la
maladie sont connues avec certitude. Tout au plus, l’on peut comprendre qu’au stade
actuel en raison du défaut d’homologation de vaccin par l’OMS contre le virus, il subsiste
des incertitudes quant à la capacité des essais actuels à contrer la maladie et des effets
secondaires. Mais, la question du vaccin est une autre question à laquelle le principe de
précaution pourrait trouver une parfaite application. Intrinsèquement la fièvre à virus
Ebola n’est pas une maladie qui tombe dans le champ des incertitudes scientifiques
absolues.

De ce qui précède, il semble que les faits ne répondent pas cumulativement à la
caractérisation de la précaution. Ces faits portant sur la maladie en cause ne soulèvent
pas des incertitudes scientifiques.
Pour notre part, nous pensons que la lutte contre la maladie ne doit pas s’inscrire
dans la perspective de la précaution. Les mesures entreprises par les autorités
politiques face à Ebola sont nées d’une cause dont les données ne sont pas sujettes à
caution ou à incertitude. Il y a ici une certitude consolidée quant au danger de la
transmission ou de la contamination au virus en question. Il s’agit ni plus ni moins d’une
applicable du principe de prévention. La prévention se distingue de la précaution quant
au degré du risque. Dès lors que le risque est potentiel, on est dans la précaution. Sait-on
si la consommation des produits issus des OGM est sans danger pour la santé humaine ?
A-t-on des certitudes scientifiques sur les conséquences néfastes du coton bt pour les
cultures biologiques et la biodiversité ? Evidemment, ces questions sont controversées
et les scientifiques ont encore des incertitudes profondes sur bien de détails. Doutons-
nous des conséquences néfastes de la pollution sur l’air et l’eau des industries de
Kossodo ou des déchets toxiques de Probo koala ? Doit-on encore convaincre les
populations des effets de la déforestation ? Les dangers de la pollution et de la
déforestation sont connues et les moyens de prévention appliquées en tout temps.
Le discours politique ne devrait pas desservir le principe de précaution. Il y a
encore des domaines d’enjeu pour lesquels il mérite d’être connu et dimensionné. En
associant la précaution aux décisions d’interdiction sans aucun débat ni délibération, on
enlève à ce principe les vertus dont il est porteur. Enfin, il est important de savoir que la
précaution, en le rapprochant de la prudence, est fondée sur cette idée :
« La prudence est la meilleure part du courage et elle est en tous cas un impératif
de la responsabilité (…). Il se peut qu’ici l’incertitude soit notre destin permanent – ce qui a
des conséquences morales » (Hans Jonas, Principe de Responsabilité, p. 257).

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